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Les entreprises s'investissent peu à peu dans la lutte contre le sida
Mardi 26 avril 2005
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GHANA: Les entreprises s'investissent peu à peu dans la lutte contre le sida


[Cet article ne représente pas le point de vue des Nations Unies]



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Protéger les employés pour assurer l’avenir de l’entreprise

ACCRA, 7 avril (PLUSNEWS) - Harouna Ibn Hassan a eu de la chance de ne pas perdre son travail. Cet instituteur ghanéen, qui a découvert sa séropositivité à la mort de sa femme il y a trois ans, avait un employeur compréhensif, ce qui n’est pas le cas de tous ceux qui vivent avec le VIH/SIDA au Ghana.

Quand Hassan s'est aperçu qu'il était séropositif, son employeur, le service de l'éducation du Ghana (GES) n'avait pas encore élaboré une politique de prise en charge du sida en milieu du travail. Mais le directeur de l’école lui a confié un poste administratif, qui lui a permis de se consacrer à son traitement.

«Quand j'ai commencé à avoir des ennuis de santé, je déposais souvent des demandes de permission pour aller chercher des traitements traditionnels. Plus tard quand j'ai réalisé que je risquais de perdre mon poste, j'ai décidé de parler de ce qui m’arrivait à mon directeur et à deux de mes supérieurs», a t-il dit a PlusNews.

Grâce au poste d'inspecteur assistant des écoles d’Accra, la capitale, Hassan, âgé de 38 ans aujourd’hui, a pu continuer à suivre son traitement à l’hôpital public de référence de Korle Bu.

«Si j'avais été assez fort pour faire correctement mon travail, j'aurais sûrement gardé le secret concernant ma séropositivité. J'ai eu de la chance que ceux à qui j'en ai parlé aient su gérer la situation», a dit Hassan.

Comme Hassan, nombreux sont les Ghanéens séropositifs qui hésitent à divulguer leur statut sérologique ou leur état de santé de peur de perdre leur travail ou d'être stigmatisés.

La situation commence néanmoins à s’améliorer pour les 20 millions d’habitants de ce pays d’Afrique de l’Ouest.

La politique nationale contre le VIH/SIDA et les infections sexuellement transmissibles (IST) du Ghana, lancée l'année dernière, a mandaté le ministère de l'Emploi, la commission nationale contre le sida et d’autres structures pour développer une stratégie tenant compte de toutes les questions liées au sida dans le milieu du travail.

Ils doivent aussi prendre les mesures nécessaires pour faire respecter les nouvelles orientations de cette politique.

L'Organisation internationale du travail (OIT), le Congrès des syndicats (TUC), le patronat ghanéen (GEA), et l'Onusida ont ensemble élaboré un cadre général de travail, mais peu a été fait pour l’appliquer.

La priorité est donnée à la prévention

Au Ghana, où le taux de prévalence au VIH/SIDA est de 3,6 pour cent, en-dessous de la moyenne régionale estimée à cinq pour cent, la priorité est aujourd'hui donnée à la prévention. «Le traitement et la prise en charge doivent être prises en compte mais ils ne doivent pas être prioritaires», a dit à PlusNews Kwasi Ampadu-Yeboah, responsable des relations industrielles de la GEA.

Néanmoins plusieurs multinationales installées au Ghana, telles que Coca-Cola ou le groupe français CFAO, ont déjà mis sur pied une politique d’assistance pour leurs employés séropositifs et leur famille pour qu’ils puissent accéder aux soins.

Là où cette politique existe, des séances d'information sont menées par des salariés et des pairs-éducateurs.

«Nous nous sommes rendus compte de la menace que cause le VIH/SIDA dans l'entreprise après l’expérience vécue par nos homologues en Afrique du Sud», a dit Jacob Amegashitsi, responsable de la formation et du développement de Coca-Cola Ghana.

«Notre politique d'entreprise fonctionne et elle est accessible à nos 750 salariés qui voudraient en bénéficier», a t-il dit à PlusNews.

La filiale ghanéenne de Coca-Cola a investi 21 000 dollars dans une politique intégrée de prise en charge des personnes infectées, lancée en 2002. Les travailleurs séropositifs sont pris en charge par des spécialistes dans trois cliniques d'Accra et de Kumasi, l'une des deux plus grandes villes du Ghana, à 250 kilomètres au nord-ouest du pays. Ils bénéficient tous de la plus grande confidentialité.

Le groupe CFAO qui, comme Coca-Cola, mène une campagne de sensibilisation et de prévention pour ses 250 employés ghanéens, a dit vouloir mettre en place un programme de traitement et de prise en charge de tous les employés séropositifs, de leurs épouses et de leurs enfants, avant la fin de l'année. Le programme inclura le dépistage volontaire et gratuit.

Les multinationales en tête de la lutte contre le VIH

Les compagnies multinationales ont plus de possibilités d'appliquer des programmes intégrés que la plupart des entreprises ghanéennes, moins sensibilisées et moins conscientes que les sociétés occidentales des problèmes rencontrés par les personnes vivant avec le virus. Les entreprises locales ont souvent moins de ressources financières pour assurer une prise en charge complète de leurs salariés.

L’Etat ghanéen subventionne le traitement et la prise en charge des personnes infectées dans quatre hôpitaux publics du pays. Mais sur les 71 000 Ghanéens qui auraient besoin d’un traitement antirétroviral (ARV) afin d’améliorer leurs conditions de vie, seuls 2 100 en bénéficient.

Ainsi, les compagnies qui veulent appliquer un programme intégré pour leur personnel sont contraintes d'acheter les ARV au prix pratiqué sur le marché.

Une étude menée au Ghana par l'organisation internationale Family Health International (FHI) en 2003 a révélé que le coût du traitement des infections opportunistes, qui se développent sur les organismes affaiblis par le virus, s’élève à 33 dollars par an au début de l'infection à VIH. Le traitement par ARV peut aller jusqu'à 1 120 dollars par an.

«Nous consacrons un à deux pour cent de notre budget annuel consacré au personnel, d’un montant de 1,2 millions de dollars, pour le traitement et la prise en charge», a dit à PlusNews Thomas Pelletier, le directeur de CFAO au Ghana.

«L'aspect humain est la chose la plus importante pour nous», a dit Pelletier. «Sur un plan strictement économique, nous considérons que c'est aussi un investissement pour l'avenir».

Les entreprises locales à la traîne

Au moment où les multinationales réalisent cet investissement pour protéger leur personnel, peu d'entreprises locales sont prêtes à en payer le prix.

Selon le GEA, des groupements professionnels tels que l'association des garagistes ont développé des stratégies de lutte contre le sida qui, à long terme, bénéficieront aux employés via des programmes de sensibilisation et de prévention. Mais pour l'heure ils n’envisagent pas de prendre en charge le traitement des personnes infectées.

«Malheureusement, la plupart des entreprises locales ne prend pas au sérieux les problèmes liés au VIH/SIDA, la plupart ne cherche qu’à survivre. Nous grattons la partie visible de l'iceberg», a dit Ampadu-Yeboah, du patronat ghanéen.

Les activistes de la lutte contre le sida ont averti que les petites, comme les plus grandes, entreprises ont intérêt à s’intéresser aux problèmes liés au sida avant qu'il ne soit trop tard, comme dans certains pays d’Afrique australe où plus de 30 pour cent de la population sont séropositifs.

«L'Afrique de l'ouest est en retard comparée à l'Afrique australe et de l'est, où les politiques de lutte contre le sida en milieu du travail sont activement appliquées», a dit à PlusNews Nana Poku, directeur de recherche sur le VIH/SIDA de la commission des Nations Unies pour la gouvernance en Afrique.

«Cette région est considérée comme la moins touchée du continent, c'est dangereux. De 1992 à 1998, le Cameroun par exemple a vu son taux de prévalence au VIH/SIDA multiplié par six», a précisé Poku.

Au Ghana, des bailleurs de fonds commencent à financer des programmes de prévention pour les petites entreprises.

«Après plusieurs années, nous nous sommes rendus compte que le VIH/SIDA peut réduire à néant tous les efforts consentis pour améliorer la vie et les conditions de travail des employés», a dit Baba Adongo, consultant en investissement du Fonds africain pour le développement (FAD), qui conditionne l’ocroi de prêts aux entreprises à la mise en place d’une politique de lutte contre le sida.

«La santé des employés est essentielle à la vie de l'entreprise», a dit Adongo.

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