AFRIQUE DU SUD: Un accès aux traitements antirétroviraux toujours difficile
DURBAN, 13 juin 2005 (PLUSNEWS) - Prudence Mabela, la première femme noire à avoir dévoilé son statut en Afrique du Sud, a demandé à la communauté internationale de rester aux côtés des personnes vivant avec le VIH/SIDA, pénalisées par un accès difficile aux traitements antirétroviraux.
«Les malades qui tentent de bénéficier du programme de traitement antirétroviral (ARV) gratuit mis en place par le gouvernement (sud-africain) se heurtent encore à de nombreux obstacles», a expliqué Mabela en marge de la deuxième conférence sud-africaine sur le sida de Durban.
«Quant aux malades qui ont besoin d’un traitement immédiat, le retard pris par les autorités dans la mise en place de ce programme les a contraints à se tourner vers des soins alternatifs. Beaucoup d’entre eux finissent par mourir», a-t-elle dit à PlusNews.
Plus de 4 000 activistes, chercheurs et hommes politiques ont participé à cette rencontre de quatre jours qui s’est tenue la semaine dernière dans la ville portuaire de Durban, sur la côte est du pays.
Mabela, en tant que directrice de l’Organisation non-gouvernementale Positive Women's Network (PWN), a vu la plupart des membres du réseau succomber des suites de maladies liées au sida. Pour elle, ces «décès inutiles» sont la conséquence des restrictions imposées par l’Etat dans le cadre de la distribution des traitements.
«Depuis 1996, seuls deux des soixante membres du réseau sont encore en vie. Assister à la mort de tant d’amis et de collègues est très triste. La plupart attendait que le programme du gouvernement démarre», a-t-elle expliqué.
Le gouvernement sud-africain a dépassé depuis mars dernier la date butoir qu’il s’était fixé pour fournir à 53 000 malades des médicaments antirétroviraux. Pour le moment, seuls 43 000 patients ont accès au traitement gratuit.
L’année dernière, plus de 300 000 personnes sont mortes en Afrique du Sud des suites d’une maladie liée au sida. Ces maladies feront également de nombreuses victimes en 2005.
Mabela a également raconté l’histoire de Jacky Mdlankomo, membre de PWN depuis longtemps sur la liste d’attente pour un traitement. Grâce à une maigre assistance et au soutien d’organisations telles que PWN, Mdlankomo a finalement pu se procurer des ARV qui lui ont permis de patienter jusqu’au lancement du programme gouvernemental.
Malgré quelques succès, Mabela a affirmé qu’il restait fort à faire pour réduire l’impact du sida en Afrique du Sud, particulièrement sur les femmes.
«Beaucoup de femmes sont vulnérables au virus parce que, bien souvent, elles ne sont pas en mesure d’imposer à leurs partenaires masculins des pratiques sexuelles sans risque», a précisé Mabela.
Selon les estimations, il y aurait 5,6 millions de séropositifs en Afrique du Sud, dont 2,5 millions de femmes.
Selon le professeur Salim Abdool Kariem, épidémiologiste de l’Université de Kwa-Zulu Natal spécialisé dans le contrôle des maladies infectieuses, en raison de l’impact «catastrophique» du VIH sur les femmes sud-africaines le pays pourrait prendre en charge une partie de la recherche de microbicides menée à l’échelle mondiale.
Ces microbicides, déclinés notamment en crèmes, gels et préservatifs invisibles, visent à donner aux femmes les moyens de se protéger contre le VIH. Cependant, Kariem s’est inquiété du manque d’intérêt que suscite une approche aussi «prometteuse», ainsi que du manque de ressources disponibles.
"Aucune grande entreprise n’est disposée à investir dans cette recherche, seules quelques petites structures le font. Ce qui est affligeant, c’est que si cette recherche profitait aux hommes, elle susciterait davantage d’intérêt», a déclaré Kariem lors de cette deuxième conférence nationale sur le sida.
Il a en outre affirmé avec insistance que les microbicides étaient la solution idéale au «besoin manifeste et urgent» de créer une méthode de prévention du VIH «maîtrisée par les femmes».
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